Marco Polo décrit le monde, il ne raconte pas son voyage. Et c'est ainsi qu'il ne dit mot, ou très peu, de ses conditions de voyage, de ses peurs, de ses émotions, des difficultés ou des succès qu'il a rencontrés. En revanche, il décrit ce qu'il a vu, ce qui l'a fasciné, a suscité en lui répulsion ou émerveillement. Il n'a de cesse de dire, surtout lorsqu'il pénètre en Chine : « ce sont merveilles à voir, merveilles à conter, merveilles à ouïr... » La splendeur des palais du Grand Khan, ses chasses et leur cérémonial raffiné, l'organisation de son administration, les « grandes et nobles villes » , les ponts innombrables, la ville de Quinsaï aux multiples canaux : tout n'est que merveille dans la parole de Marco Polo que transcrit Rustichello, auteur de romans de chevalerie et compagnon de cellule dans la prison génoise où ils furent tous deux enfermés en 1298. Récit oral où la parole présente à l'auditeur l'expérience