«La Cuisine russe» se veut à la fois "ethnologie" d'une nourriture, livre de souvenirs, recueil de recettes. Custine, Dumas, Gautier et d'autres se sont penchés, en leur temps, avec perplexité ou enthousiasme, sur cet art culinaire qui leur a paru souvent très exotique, alors qu'aujourd'hui le mot blini est entré dans le vocabulaire courant. "On ne naît pas russe, on le devient", ai-je envie de dire. Durant l'été 1944, la Croix-Rouge russe avait organisé à Gif-sur-Yvette, près de Paris, un camp de vacances pour les enfants de l'immigration. Tout le monde ici était russe, tout le monde parlait russe, et le dimanche les parents venaient en visite et organisaient des fêtes russes. Le matin, on nous servait de la bouillie d'avoine, de l'«ovsianka», qu'on appelait «kacha», il fallait la manger et on la mangeait, nous étions des enfants rachitiques à qui on avait inculqué qu'"on ne doit pas gâcher la nourriture". Dans ma jeunesse, en France, je savais que je n'étais pas tout à