Dans la production féerique de la fin du Grand Siècle, les conteurs masculins occupent une place à part ; moins prolixes et moins précieux que les conteuses, moins rétifs envers les origines folkloriques du genre, ils s'approprient le conte de fées d'une façon originale et, en usurpateurs d'un territoire littéraire tenu pour essentiellement féminin, ils n'hésitent pas à détourner habilement cette forme malléable qu'ils récupèrent à leurs propres fins: Perrault, dont sont ici regroupés, pour la première fois, les différents états du texte de ses contes, puise dans les sources populaires, mais il met aussi la féerie au service de la cause moderne; le chevalier de Mailly, aux antipodes de la veine misogyne de l'Académicien, offre des récits merveilleux aristocratiques et déjà "féministes", tandis que Fénelon, à travers des anti-contes déceptifs et parodiques, nous ouvre le chemin du "pur amour". Préchac, de son côté, mêle adroitement aux allusions véridiques la fantaisie la plus débridée